dimanche 4 septembre 2016

Ce qu'il cache ce burkini ...


Je vais m'en vouloir d'avoir participé à ce faux débat dans son timing, son ampleur et son champs d'analyse. Néanmoins, je vais en profiter pour revenir sur les notions théoriques de laïcité, liberté et d'égalité, pour ensuite commenter d'une façon plus pragmatique l'hypocrisie du débat ainsi que ses dessous politiques dangereux.


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La meilleure définition de la laïcité que j'ai trouvée est chez Albert Jacquard: La laïcité consiste à prendre des décisions au nom des hommes, de leurs besoins et aspirations, non pas au nom d'une révélation externe telle une directive religieuse. Elle ne signifie pas la repression des religions comme on commence à le constater en France. Elle ne se limite pas non plus à la doctrine religieuse, mais toute doctrine qui nous parait aujourd'hui sacrée telle que le capitalisme avec ses valeurs de propriété privée et de compétition entre hommes dans une logique de marché. Dans ce sens, notre société occidentale est loin d'être laïque.

La laïcité reconnait ainsi l’individu comme citoyen libre participant à la société, à son sort, et en faisant partie intégrante. Elle reconnait son identité, et l’aide à la forger. Quand l'individu se voit privé d'une réelle participation à la société, sa relation avec elle devient conflictuelle et peut finir soit par une révolte consciente, soit par une vengeance contre soi ou par une violence envers elle. Notre société occidentale avec sa démocratie délégative illusoire et la concentration du pouvoir dans les mains d'une seule classe sociale exclue des catégories entières (pauvres, femmes, immigrants...) de cette participation. Le fanatisme dans le monde entier est en partie la manifestation de cette exclusion, que ça soit religieux comme Daesh, ou politique comme l'extreme droite. En effet, c'est une recherche d'identité qui peut devenir suicidaire comme dirait Amin Maalouf, surtout en l'absence de forces révolutionnaires aiguillant la colère.

Donc la citoyenneté nécessite comme condition la liberté de l’individu, mais encore faut-il définir cette liberté. La liberté d'un individu dans une société n'a pas de sens que si elle est associée à des contraintes. Cette dynamique de liberté-contrainte nourrit la participation du citoyen à sa "cité" et lui donne du contenu, mais à condition qu'elle soit égale pour tous les citoyens. L’équilibre auquel arrive cette dynamique résulte du dialogue continuel des individus avec la société, qui est au final le synonyme de leur participation. Cet équilibre n'est pas immuable, mais évolue avec l'évolution de la société. C'est dans cette optique que je voudrais considérer le burkini. La liberté de le porter est associée à la contrainte des autres de le voir, et donc la contrainte de voir les autres aussi  exercer leur liberté de s'habiller. Je pose ainsi les questions suivantes:
  • Est-ce que les femmes portant le burkini ont eu la possibilité de participer réellement à la société?
  • Est-ce que leur identité forgée est le résultat d'une libre participation? d'un dialogue avec la société?
  • Est-ce qu'on a considéré la dynamique liberté/contrainte de s'habiller en respectant le principe d'égalité?
Non à mes yeux. Personnellement je considère le burkini comme un syndrome de la domination masculine sur les femmes, mais je crois que le seul moyen d'en finir est d'inviter les personnes concernées à participer librement et d'une façon égale à la société. Toute attaque aux syndromes, sans considérer la maladie, ne ferait qu'aggraver la maladie.

Maintenant passons à l’aspect plus concret du débat burkini en France. Il est hypocrite parce qu'il se réclame défenseur des droits de la femme alors que c'est probablement le sujet le moins structurant dans cette thématique par rapport à d’autres sujets comme le salaire des femmes comparé à celui de l'homme, la reconnaissance de la grossesse comme travail... Il est aussi hypocrite parce qu'il se réclame défenseur de la laïcité, alors qu'on tire dessus à chaque décision prise au nom du peuple mais qui n’émane pas de celui-la, comme par exemple en utilisant l'article 49.3.

Enfin, le vrai enjeu derrière toute cette polémique est d'ordre politique afin de mobiliser les gens, de récupérer les voix et de détourner l’attention. Le danger de ce jeu c'est de pousser plus les gens dans le fanatisme et préparer les identités meurtrières de demain.




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